afrique@listes.univ-lyon1.fr
[Top]

Re: Analyse sur la CI

To: prostaglandine2@yahoo.com, ndounna@caramail.com, afrique@univ-lyon1.fr
Subject: Re: Analyse sur la CI
From: "Cyriaque Paré" <pare8@hotmail.com>
Date: Sat, 28 Sep 2002 15:40:34 +0000
Delivered-to: afrique@dns2.univ-lyon1.fr
Delivered-to: afrique@univ-lyon1.fr
Après Houphouët
Mille problèmes, un exutoire : les Burkinabè

Très récemment, la Côte d'Ivoire a décidé de démobiliser plus de 700 militaires, car semble-t-il, ils auraient été recrutés par Robert Guéi la bête noire du régime. Ces derniers, ont pris les armes pour marquer leur désacord. La mutinerie en Côte d'Ivoire a entraîné la mort de 270 personnes et blessé 300 autres. Parmi les victimes, Emile Boga Doudou, ministre de l'Intérieur et Robert Guéi, président de l'UDPCI. Comme une tradition instaurée par les successeurs d'Houphouet Boigny, le Burkina a été encore indexé. Pourtant, c'est en Côte d'Ivoire même qu'il faut rechercher ceux qui profitent des crises.

Le président Laurent Gbagbo a pris les commandes du navire ivoirien au terme d'une décennie de difficultés dues à la chute du cours des matières premières, l'arrêt des financements extérieurs et les errements des hommes politiques. Apparemment incapables de faire face aux vrais problèmes qui taraudent les Ivoiriens du fait de la crise économique généralisée, les dirigeants de la Côte d'Ivoire qui se sont succédé depuis la mort de Félix Houphouet Boigny n'ont pas trouvé mieux que de jeter de la poudre aux yeux des Ivoiriens en transformant une xénophobie latente au sein de la population en programme de gouvernement. Les étrangers (entre 26 et 35% de la population ivoirienne selon les sources) sont devenus les responsables des dégradations de la météo politique ivoirienne et quand la Côte d'Ivoire qu'ils ont grandement contribué à bâtir s'enrhume, ce sont eux (les étrangers) qui éternuent. Cela a commencé avec Henri Konan Bédié le chantre de l'ivoirité et les discours que tiennent les autorités ivoiriennes lors de la dernière crise en date montrent que cela ne va pas s'arrêter de si tôt. Le ministre de la Défense, Moïse Lida Kouassi qui, manifestement surestime les capacités de son armée a en effet affirmé qu'une intervention étrangère aurait eu lieu à partir du Nord et que six véhicules 4x4 partis de la frontière du Burkina et mis en déroute auraient fait demi-tour et franchit la frontière burkinabè. On n'hésite pas à dire que les insurgés ont des armes ayant servi dans les armées étrangères tandis que le président Gbagbo (sans doute encore sous le coup de l'émotion causée par le fauteuil présidentiel qui lui est tombé sur la tête en 2000) voit dans ses hallucinations post-traumatiques que "la Côte d'Ivoire est attaquée". Propos complètement saugrenus, car une armée professionnelle comme celle du Burkina ne songerait pas à envahir la Côte d'Ivoire avec six ridicules tout-terrains. Ce qui est sûr, les conséquences de ces bavures politiques sont là. Des milliers de Burkinabè sont à nouveau les souffre douleurs de certains Ivoiriens. Leurs baraquements sont pillés par une prétendue armée beaucoup plus guidée par son ventre que par tout autre considération. Le Consulat du Burkina à Bouaké a été saccagé, le personnel violenté, la famille du Consul molestée. Suprême injure de la part de gens qui se croient au-dessus des autres.

La Côte d'Ivoire lutte contre ses propres démons

Dès les premiers coups de feu en Côte d'Ivoire, on a parlé de mutinerie, puis de coup d'Etat. Maintenant, on parle d'agression extérieure et c'est le Burkina qui est mis en cause sans une once de preuves. Mais à y regarder de près, l'on voit que cette mutinerie (coup d'Etat ou attaque), ne profite aucunement au Burkina ni à sa diaspora vivant en Côte d'Ivoire. L'intensité des échanges marchands et humains est telle que si la Côte d'Ivoire, subissait une secousse tellurique, l'onde de choc se ressentirait de Niangoloko à Diapaga. Le Burkina compte plus de 3,5 millions de ressortissants en terre ivoirienne et ce n'est pas le ministère de l'Action sociale, et certaines associations qui se démènent pour adoucir le retour forcé d'immigrés burkinabè de la Côte d'Ivoire qui diront le contraire. Au contraire, à la réflexion, on voit que c'est Laurent Gbagbo qui est le principal bénéficiaire de cette crise. Primo, cela lui a permis de se débarrasser d'un rival politique qui se montrait de plus en plus encombrant par ses propos corrosifs envers le régime paranoïaque de Laurent Gbagbo : le général Robert Guéi. On n'oublie pas en effet, que pas plus tard qu'en mi-septembre, ce dernier traitait le chef historique du FPI de boulanger roulant ses adversaires politiques dans la farine et martelait que la Côte d'Ivoire souffrait de "complotite aiguë". Il n'en fallait pas plus pour voir en lui, le levain des remous et pour décimer sa famille. Il reste à espérer pour Gbagbo que l'ethnie Yacouba dont le défunt président est originaire ne soit pas tentée par une vendetta. Secondo, cette crise permet à Gbagbo et aux tenants de l'ivoirité de pourquoi pas, piller et chasser les travailleurs immigrés, les Burkinabè en l'occurrence. Ce qui s'est passé dans les banlieues d'Abidjan en est la triste illustration. Tertio, cette mutinerie-coup d'Etat-attaque attire suffisamment l'attention au point d'occulter des affaires bien embarrassantes pour la Côte d'Ivoire comme celle des deux milliards volés à la BCEAO d'Abidjan et celle de l'assassinat de Balla Kéita en Août dernier à Ouagadougou. D'ailleurs, à la lumière de ce qui se passe en Côte d'Ivoire, on peut se demander si le meurtre de ce dernier par des tueurs venus du bord de la lagune Ebrié n'était pas le signe précurseur d'une nuit de longs couteaux qui devait emporter ceux qui faisaient de l'ombre au pouvoir. Le très sérieux quotidien français Libération vient de révéler un autre aspect de l'affaire en écrivant que "la prétendue mutinerie cache une guerre au sein du gouvernement". Pour l'auteur de l'article, une guerre sourde opposait Emile Boga Doudou, le ministre de l'intérieur à Moïse Lida Kouassi, son collègue de la Défense. C'est ce dernier qui l'a emporté sur le premier qui faisait peur à ce qu'on dit, même au président. L'article conclut que "les mutins n'en sont pas : soit, ils ont été manipulés, soit ils travaillent en service commandé. Maintenant, il s'agit de les faire taire en les éliminant et de détourner l'attention en criant à l'infiltration extérieure, en désignant à la vindicte populaire les travailleurs immigrés burkinabè. La thèse du complot extérieur a aussi l'avantage de forcer la France à appliquer l'accord de défense qui lie les deux pays depuis 1962". Véritable mutinerie ou mise en scène, cette crise ne pouvait pas mieux tomber pour les autorités ivoiriennes pour espérer renforcer le pouvoir dictatorial du FPI.

Désiré T. SAWADOGO
L'Hebdo du Burkina





Cyriaque Paré
http://www.burkinet.com
http://www.burkina.org


_________________________________________________________________
Send and receive Hotmail on your mobile device: http://mobile.msn.com


<Prev in Thread] Current Thread [Next in Thread>